Interrogé sur les soupçons qui pèsent sur lui dans l’affaire de Karachi, Nicolas Sarkozy retourne l’accusation contre le journaliste dans l’intention de lui démontrer qu’il est facile de porter des accusations infondées :
« Et vous, j'ai rien du tout contre vous. Il semblerait que vous soyez pédophile… Qui me l’a dit ? J’en ai l’intime conviction. Les services. De source orale. Pouvez-vous vous justifier ? Et ça devient “je ne suis pas pédophile”. Mais attends. Faut être sérieux quand même. Soit vous avez quelque chose et dans ce cas là j'y réponds bien volontiers. Soit vous avez rien et parlez-moi de choses intéressantes... »
Ce parallèle avec la pédocriminalité est inadmissible. En effet, cette analogie renforce l’idée reçue selon laquelle les enfants qui dénoncent les violences sexuelles dont ils et elles peuvent être victimes, sont avant tout à considérer comme des affabulateurs.
Se positionner de cette manière-là en tant que Président de la République, c’est envoyer un message fort à tous les pédocriminels : « Soyez tranquilles ! Nous savons bien que les enfants sont des menteurs ! » C’est aussi renforcer leur stratégie de défense habituelle : nier les faits et porter le discrédit sur les jeunes victimes.
Nous savons pourtant qu’en France, près de 1 960 000 personnes sont victimes d’inceste : 80% de filles ; 20% de garçons.[1] A cela, il faut ajouter les enfants victimes en dehors du cadre familial. L’ampleur de ces estimations démontre clairement que la pédocriminalité n’est pas un phénomène marginal.
Dans ce contexte, les propos tendancieux du Président de la République ont une conséquence gravissime : contribuer à étouffer la parole des jeunes victimes.
Or, une société qui n’entend pas ses victimes, est une société qui favorise le développement des violences. Toutes les études sérieuses montrent que la violence est un apprentissage : les jeunes auteurs de violences sont aussi des jeunes victimes qui n’ont pas été protégées et qui n’ont pas été entendues.
N’en déplaise au Président et à son gouvernement, la délinquance n’est pas génétique et aucun test ne pourra dépister les futurs délinquants dès l’âge de trois ans. En revanche, celles et ceux qui ont une réelle volonté de lutter contre les violences, savent que cela passe prioritairement par l’écoute et la protection de toutes les victimes.
L'égalité, c'est pas sorcier !
[1] Voir : http://www.aivi.org – rubrique : Nos actions ; sous-rubrique : « Sondages IPSOS ».
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